mardi 9 mai 2017

TOP CINE 2010's : LE TERRITOIRE DES LOUPS (2011)

LE TERRITOIRE DES LOUPS (2011) :
ET LA MORT N’AURA PAS D’EMPIRE.

par Arthur Cauras, 10.05.2017


Après le crash de leur petit avion en pleine forêt d'Alaska, isolée de tout, une bande de rescapés va tâcher de survivre dans cette nature enneigée autant splendide qu'hostile envers les hommes civilisés. 



Survival violent et sans fioritures, LE TERRITOIRE DES LOUPS est avant tout une véritable réflexion sur la Grande Faucheuse, qui nous attend inexorablement, et comment chacun y fait face.
Solennellement et crédiblement, le film assène la mort sans logique particulière, de manière sordide ou sereine à ses personnages affaiblis, nous laissant y assister objectivement ou depuis le point de vue du mourant qui la subit. La scène du père se remémorant sa fillette aux longs cheveux tandis que des loups le massacre est à ce titre aussi poétique que tétanisante.

La mort est brutale, et arrache à la vie tel le héros extirpé de ses songes réconfortants (un moment suspendu dans le temps, sous les draps blancs avec sa femme) par l’accident soudain frappant le petit avion.
Le film nous flagelle de séquences à glacer le sang (la survivante tremblante au loin en contre-jour… qui est en fait un cadavre en train d’être dévoré par un loup hors de la vue du personnage voulant se porter à son secours), des pics de stress qui nous malmènent en nous sortant de l’état contemplatif dans lequel l’entreprise baigne.

Dans THE GREY, les loups sont très anxiogènes,
et c'est peu de le dire.


La magnifique musique accompagne les personnages sur leur styx neigeux, d’un rythme calme, apaisant, bienveillant, symbolisant tantôt un espoir, tantôt un effort, une pause, un arrêt définitif, un accompagnement plus ou moins violent dans l’au-delà. Le travail de Marc Streitenfeld (habitué du rôle de compositeur chez Ridley Scott, qui est ici producteur) entérine une mélancolie de tous les instants.

On ne juge pas, dans LE TERRITOIRE DES LOUPS. On observe. On peut tout d’abord souhaiter du mal à celui qui est présenté comme le salaud du groupe, puis on se ravise. Chacun a ses failles. Les masques sociaux tombent. Les personnages s’ouvrent durant une accalmie entre deux attaques, entre deux avatars. On parle des choses qui ont compté dans la vie. On se prend d’empathie. On se rend compte que, dans l’absolu, personne ne mérite vraiment de périr. Mais pourtant la vie, ou plutôt la Nature doit poursuivre inlassablement son cycle, que ça plaise ou non, que ça paraisse juste ou non, que ça détruise moralement ou pas, que ça ait des séquelles sur les familles par la suite, ou pas. C’est cette impartialité qui nourrit sa noblesse, c’est ce qui la rend inexorablement fascinante. 

Ce qui fait de nous des hommes pour le réalisateur Joe Carnahan, déjà auteur de l'excellent NARC, c'est de toujours se battre jusqu'au dernier souffle tout en acceptant cette fatalité qu'au bout du chemin, ce soit la même fin qui nous attende tous.
"Vivre et mourir en ce jour…"
Lors de cette histoire quasi-métaphysique où la mort peut frapper à tout instant, l'homme est montré sous son jour le plus viril (combattre des loups avec des armes de fortune, résister à la faim, faire face à la mort) mais également le plus sensible (l'entraide, les réconfortants souvenirs avec les proches, la peur de mourir).
Lier la nostalgie et la survie, tout en proposant un spectacle haletant et immersif au sein de décors grandioses ; voilà l'objectif escompté et atteint par ce transcendantal TERRITOIRE DES LOUPS.

Tout est une question d'instinct, même pour un personnage
aux pulsions suicidaires.


« La peur n’évite pas le danger » dit-on… Ici, la peur n’empêche pas la mort. Parfois, après avoir tout donné, il s’agit tout simplement de la prendre dans ses bras comme une vieille amie.


Arthur Cauras.

ps: une partie de cet article avait été à la base publiée dans le magazine FIGHTSPORT n°101, dans une rubrique où les gens de la communauté des Arts Martiaux pouvaient parler de leurs films préférés. J’y avais participé en tant que réalisateur et monteur dans le milieu des Arts Martiaux.


ps2: Pour ceux qui ne sauraient pas, une très courte séquence survient après le générique de fin... Pas grand chose à voir avec les teasings Marvel, autant vous le dire tout de suite.


Trailer VOST:


Fiche technique 
Réalisateur : Joe Carnahan
Scénario : Joe Carnahan & Ian Mackenzie Jeffers
Avec : Liam Neeson, Frank Grillo, Dermot Mulroney
Année : 2011