Réalisateur de 2 courts-métrages; le vigilante JOUR APRES JOUR avec Jo Prestia tourné en Super 16mm, et le post-apocalyptique POINT ZERO avec Alaa Safi, filmé en Red One, sélectionné / primé dans des festivals tels que Sitges Fantastic Film festival (Espagne), Baghdad International Film Festival (Irak) et le Wasteland Film Festival (USA).
Je travaille actuellement sur mon 2ème documentaire sur le M.M.A.
Vendu fallacieusement en France comme suite d’AMERICAN WARRIOR, l'un des fameux films de ninjas ayant fait la gloire de la Cannon, AVENGING FORCE était à la base prévu pour être une séquelle à INVASION USA avec Chuck Norris. L’autre star de la Cannon, Michael Dudikoff, reprend le flambeau dans cette histoire le mettant aux prises avec le Pentacle, un groupuscule de suprémacistes blancs chassant le chaland dans les marécages de Louisiane, entre deux attentats contre un candidat noir (Steve James !) au poste de sénateur…
Ici, on ne s’embarrasse pas des « détails » (Dudikoff cavalant comme un lapin alors qu’un carreau d’arbalète lui a transpercé la cuisse), et on va droit au but : l’action, généreusement présente tout comme le manque de finesse de cette entreprise, dans la lignée de ce que produisait les fameux cousins Menahem Golan & Yoram Globus.
Le style des chasseurs très comics book d’époque n’est pas toujours très heureux, et les combats ainsi que la direction artistique accusent souvent leur âge. Mais si l’on se fade par exemple un chasseur adepte de Kendo qui ne touche pas une bille dans cette discipline, on est par ailleurs gâté par le catcheur semblant tout droit sorti de MAD MAX 2, se saisissant de Dudikoff et jouant avec lui comme si c’était un mannequin de lutte. Les techniques spectaculaires qu’il lui inflige ont d’ailleurs du laisser quelques séquelles au cascadeur lors du tournage, notamment le moment où celui-ci est balancé de toute sa hauteur les reins sur un tronc d’arbre ! Le leader du groupuscule (joué par le génial John P. Ryan) utilise quant à lui un garrot à tourniquet métallique qui n’est pas sans rappeler un passage atroce du futur CARTEL de Ridley Scott.
Le dernier acte renvoie quelque part au séminal LES CHASSES DU COMTE ZAROFF, avec son affrontement final au sein d’une demeure cosy. On y solde les ardoises façon duellistes, attendant le signal pour se rentrer dedans à coups d’armes médiévales ! Le tout se clôturant sur une fin ouverte appelant une suite qui ne verra jamais le jour.
L’ambiance pluvieuse des traques dans le bayou, assez cinégénique, évoque le SANS RETOUR de Walter Hill, et on est régulièrement surpris par le sadisme du film, avec ses massacres n’épargnant pas les enfants… le tout sur une musique rythmée pompant régulièrement celle du chef d’oeuvre POLICE FEDERALE, LOS ANGELES. Tous ces emprunts / pompages terminent d'apposer le sceau de la Cannon à cet AVENGING FORCE, tant les films de la firme étaient souvent conçus tels des créatures de Frankenstein !
Michael Dudikoff expliquera qu'il aura été rudoyé sur le tournage, notamment dans les séquences se déroulant dans les marécages, avec la pression de la faune locale (des alligators, des serpents d'eau), les joutes à mains nues qui lui coûteront un morceau de son lobe d'oreille, et par le fait de rester détrempé du petit matin au soir... Son implication se sent, et participe à faire d'AVENGING FORCE un bis pour les nostalgiques de vidéoclub, qui n’ennuie jamais.
- Arthur Cauras.
nb : ce sujet est issu de mon article "Proies et chasseurs : les films de chasse à l'homme", présent dans le livret collector de l'édition limitée de la VHS box CHASSE A L'HOMME éditée chez ESC éditions à 1000 exemplaires, aujourd'hui épuisée.
Ces deux long-métrages sont inextricablement liés par bien des aspects. A la base, une nouvelle d’une vingtaine de pages de Robert Sheckley : The Prize of Peril (1958), racontant les dernières heures de vie d’un participant à un jeu télévisé futuriste, où la mort est mise en spectacle. Après une adaptation télévisée allemande, LE JEU DES MILLIONS, la nouvelle attire l’attention du réalisateur français Yves Boisset, qui en achète les droits et livre un film d’une noirceur et d’un cynisme particulièrement glaçants : LE PRIX DU DANGER. Notamment via les commanditaires de ce jeu macabre, qui en légitiment l’existence par le fait que selon eux, il libère les spectateurs de leurs pulsions de violence… Les jours de diffusion de l’émission, la délinquance est inférieure à la normale, comme en temps de guerre. A les croire, une véritable entreprise de salubrité publique !
Boisset est fidèle au matériau de base et ancre son histoire dans le réel, avec mise en scène sans emphase, caméra épaule, décors urbains déprimants, dans lesquels le héros doit fuir ses poursuivants, comme lui des chômeurs n’ayant plus rien à perdre… Le tout rythmé par un présentateur façon Léon Zitrone décadent, déclenchant la haine de la foule envers le héros entre deux rappels faussement concernés sur la famine au Tiers-monde ! Les vrais présentateurs de l’époque le prendront d’ailleurs pour eux et priveront le film de promotion dans leurs émissions… Tous ces personnages sont au final les marionnettes du même système totalitaire, qui les endort avec leur télé-réalité aussi outrancière que stupide. Un film pour beaucoup visionnaire.
Gérard Lanvin en monsieur-tout-le-monde plongé dans un jeu macabre qui ravit et abruti la population.
Dans la nouvelle de Sheckley, il y a un humour qu’on ne retrouve pas dans le film de Boisset… Mais dans le roman Running Man de Stephen King, aussi sombre soit-il. Edité en 1982 après avoir pris la poussière dix ans dans un tiroir, le roman du maître de l’horreur part d’une idée de base proche de la nouvelle. Toutefois, King développe forcément énormément cette dernière avec ses quelques 220 pages supplémentaires, et n’a officiellement jamais parlé de la nouvelle de Sheckley… En 1987 est greenlightée son adaptation, avec l’immense star Schwarzenegger, tout juste sortie de PREDATOR.
Boisset voit rouge et entamera un procès pour plagiat qu’il remportera après de longues années. Ce qui explique les très rares diffusions du film américain en France, et l’absence jusqu’à maintenant de DVD / blu-ray légal sur le territoire.
On peut aussi faire rentrer dans la boucle un petit film d'exploitation méconnu, mais dont la trame ressemble également à ce RUNNING MAN : il s'agit de 2072, LES MERCENAIRES DU FUTUR, réalisé 3 ans auparavant par Lucio Fulci.
Le roman de Stephen King est un joyau d'une noirceur absolue.
Quoiqu'il en soit, RUNNING MAN joue la carte du grand spectacle pyrotechnique, très différent du LE PRIX DU DANGER… Mais également très différent du roman de Stephen King, qui est d’une violence et d’une noirceur abyssales. On rappelle par exemple que la femme du héros y tapine pour gagner de quoi acheter des médicaments à leur bébé souffrant, ce qui pousse le jeune père de famille à s’inscrire à ce jeu dont personne ne sort jamais vainqueur. On peut aussi citer ce passage où les Traqueurs, des professionnels à l’écoute de la chaîne, trouvent un des jeunes participants, qu’ils ne tuent pas le temps de lancer une page de publicité lucrative. Après celle-ci, le malheureux est tellement mitraillé qu’il n’est plus qu’un tas de loques et de morceaux de peau ensanglantés… L’audimat grimpe en flèche. C’est ça, le Running Man de King, et on en ressort avec le moral au plus bas !
L'adaptation, aussi éloignée que faire se peut du roman, livre son lot d'idées très 80's.
Le film ne va pas du tout dans cette direction macabre, même si certaines idées amènent à leur manière à la réflexion sur l’abrutissement des masses par le spectacle à l’américaine. Comme ce faux trailer de l’émission « la course aux dollars », aussi pervers que crédible. Ou encore le fait que les Traqueurs soient des simili-catcheurs ultra-violents, sur-jouant entre deux tueries, équipés de tronçonneuses et autres lance-flammes. Le public est toujours avide de massacres, pour fuir un quotidien déprimant, et vibre pour les Traqueurs plutôt que pour les innocents qu’ils poursuivent. Le présentateur joué par Richard Dawson qui a longtemps animé de véritables jeux télévisés, est on ne peut plus juste, haranguant les foules contre le musculeux Arnold Schwarzenegger.
Pas beaucoup de suspens concernant la survie de dernier ; il dézingue les chasseurs les uns après les autres après des punchlines « so-80’s », avant de renverser la dictature en place à l’aide de résistants planqués… dans le relais satellite de l’arène-même du jeu ! Pour apprécier RUNNING MAN, il ne faut pas être très regardant sur un scénario souvent cousu de fil blanc, et se concentrer sur l’action généreusement dispensée du début à la fin. Exit aussi la fin tétanisante du roman.
Dans le cas des deux films, la dénonciation de la télévision du futur bat son plein, présentée comme l’outil premier de manipulation des masses d’un régime totalitaire, doublé de cette obsession de la course à l’audimat. Un constat alarmant et actuellement on ne peut plus proche de la réalité, auquel s’ajoute celui sur la nature profondément vicieuse de l’être humain, toujours attirée et intéressée par la violence la plus crasse.
- Arthur Cauras.
nb : ce sujet est issu de mon article "Proies et chasseurs : les films de chasse à l'homme", présent dans le livret collector de l'édition limitée de la VHS box CHASSE A L'HOMME éditée chez ESC éditions à 1000 exemplaires, aujourd'hui épuisée.