dimanche 22 mai 2022

LOVE + DEATH + ROBOTS, volume 3 (Tim Miller, 2022)


LOVE+DEATH+ROBOTS
volume 3
(créé par Tim Miller, 2022)

Personnellement très fan des 2 premières saisons, il me tardait de découvrir la 3ème de cette série de Tim Miller, qui ressemble finalement bien à son créateur cinéaste, quand on prend en compte ses DEADPOOL (action + humour gras) et TERMINATOR : DARK FATE (action + SF + drame).

Dans ce volume 3, certains épisodes sont moins réussis que d'autres (je passerai sous silence l'embarrassant "ALLEZ FEU!"), et c'est quelque part le jeu de toute anthologie.
Mais on retiendra surtout 2 chefs d'oeuvre et plusieurs coups d'éclat...


"LE POULS BRUTAL DE LA MACHINE", qui traite de la survie d'une cosmonaute devant trainer le cadavre de sa collègue morte sur la lune de Jupiter, est magnifique, hypnotique et transcendant, usant de certains codes de la SF, dont le flou de perception entre réalité, délire et fantasme. Le parcours de l'héroïne, un véritable chemin de croix, montre en effet son obligation d'absorber régulièrement des substances pour se maintenir en vie, substances aux effets secondaires psychotropes. 
Alors qu'elle perd espoir et qu'elle est sous pression, sous l'effort, elle s'imagine (ou pas) sa camarade converser avec elle, tandis que l'environnement autour d'elle change, illustrant les propos de la lune elle-même, mais aussi la déperdition de l'héroïne. Ce bijou rappelle aussi bien les chefs d'oeuvre SOLARIS de Tarkovski, ANNIHILATION de Garland, que la bd ludique LA PLANETE AUX 1000 PIEGES pour ses "décors organiques".


Une véritable réussite... c'est ce qu'on pense aussi de la nouvelle tuerie de Alberto Mielgo, "JIBARO", qui avait pondu le meilleur épisode de la saison 1, "THE WITNESS". On se répète et on insiste, mais ce réalisateur doué de très solides compétences dans le domaine de l'animation, est un véritable génie. 
Il connait et maîtrise tous les aspects de la narration : sa mise en scène est atypique et en même temps totalement immersive. Ici, il montre le massacre d'une unité de Conquistadores par une sirène dans un lac perdu en pleine jungle... mais l'un des soldats est sourd et muet, et une relation étrange va naître entre les 2 individus. Il y a tant à dire sur le travail de Mielgo qu'on ne saurait par où commencer : c'est vertigineux.
Le character design, la scénographie des scènes équestres et de danse de la sirène, la musique absolument superbe, le sound-design travaillé comme rarement (jouant sur le fait que le héros soit sourd), le choix des focales, la rythmique du montage, l'étalonnage et l'éclairage de certaines scènes (la nuit façon nightshot, la détérioration du capteur pour signifier la folie ou la souffrance...)... Mielgo utilise absolument tous les outils de la fiction pour nous attraper dans sa toile d'araignée, et nous narrer une nouvelle métaphore de l'amour toxique, après son excellent "THE WITNESS".
En effet, sa première incartade ne relatait rien d'autre que l'aspect anéantissant d'une relation amoureuse toxique, sous forme de boucle en 3 temps, quand la dernière flamme s'éteint et fait perdre les pédales, transformant celui qui part en nouveau futur péteur de plombs. Dans "JIBARO", on peut lire la déception amoureuse entre deux êtres qui ne cherchent au final pas la même chose, quand bien même ils se sont trouvés initialement de par leur singularité : l'un est porté sur les sentiments et le besoin d'attention tandis que l'autre capitalise sur le matériel et la nécessité d'autonomie. On peut aussi y voir une image de la femme en tant qu'objet de fascination total auquel on ne peut résister (la scène du striptease absolument hypnotisante dans "THE WITNESS" et bien entendu, les scènes de manipulation psychique via le cri de la sirène dans "JIBARO"), avec les désastreuses répercussions allant de pair.
Des messages en sous-truchement de texte autant brillants que fascinants, dans le sens où le spectacle reste total même si on ne les voit pas.
Voilà donc un auteur maîtrisant pleinement la forme et le fond, que l'on espère réellement revoir au plus vite. L'un de ses derniers animés, le très beau "THE WINDSHIELD WIPER" (là encore au sujet de l'amour), a juste gagné l'Oscar du meilleur film d'animation !


A côté du retour sympa des "TROIS ROBOTS", relatant les dérives fatales de la race humaine façon jobards accoudés au comptoir d'un PMU, et de la guerre rurale entre "LES RATS DE MASON" contre une machine en forme de scorpion (histoire qui malheureusement ne mène à rien), L+D+R nous envoie sans prévenir une autre pépite : "LA NUIT DES PETITS MORTS".
Un concept, une mise en images et une histoire aussi simples qu'efficaces. Tout est en plan large, les séquences s'enchaînent comme autant de photos animées, légèrement accélérées (voix y compris), montrant comment un couple forniquant dans un cimetière déchaîne une malédiction ramenant les morts à la vie... beaucoup d'humour dans ce traitement permettant de prendre du recul face à une catastrophe planétaire, dont le final nous remet à notre juste place.
"L'ESSAIM" et "MAUVAIS VOYAGE" sont tous les deux prenants et originaux à leur manière. Dans le premier, un scientifique entre dans une sorte d'écosystème extraterrestre millénaire, pour y observer ses forces et qualités, accompagné d'une autre scientifique déjà présente "sur les lieux". Les formes de vie tiennent de la créature sous-marine, et les héros se déplacent fluidement comme s'ils nageaient, un peu à la manière du protagoniste de GANDAHAR au sein du Métamorphe.
Dans "MAUVAIS VOYAGE", un marin fait un pacte avec une monstruosité à l'apparence de crabe géant qui massacre l'équipage. Le crabe communique avec le marin par le biais du tronc d'un mort, et demande a être débarqué sur une île en échange de lui laisser la vie. L'atmosphère est anxiogène, et on redoute tout ce qui se passe dans la cale où se retranche la créature. Il est donc très dommage, comme pour "L'ESSAIM", que les enjeux ne soient pas plus captivants, et surtout que la fin ne soit pas à la mesure de ce qui a précédé, nous faisant rester sur un léger sentiment de frustration.


Ce n'est pas le cas de "DANS L'OBSCURITE DES PROFONDEURS", qui commence comme un film de guerre avec troupe d'élite américaine à la poursuite d'ennemis ayant capturés un otage. A peine entrés dans la grotte où se sont engouffrés leurs cibles, il retrouvent l'otage totalement décharné... "Mais quelle arme peut faire ça?". Ils le découvrent rapidement, et tandis que l'escouade se fait inexorablement massacrer, ils pénètrent au plus profond de la terre, avant de tomber nez-à-nez avec le noeud de leur problème... Comme régulièrement dans l'anthologie, une histoire qui pourrait être sortie du wargame Warhammer 40,000. Sensation de grandeur, d'infini, métaphysique et fin bien méchante font de cet épisode un incontournable de la série.

Ce retour de la série SF animée de Netflix est donc une vraie réussite, méritant largement d'être vu. Et revu !


- Arthur Cauras.



Article sur les 2 premiers volumes :

TRAILER VF



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire