mardi 30 mars 2021

RUN & KILL (cat.3, Billy Tang, 1993)



RUN AND KILL
(Billy Tang, 1993)



Quoi de mieux qu'un bon vieux Catégorie III* pour s'enjailler en ces temps difficiles? Rien, bien entendu. Pour rappel, les "Cat.3" sont des films de Hong Kong qui ont été classés interdits au -17 ans sur l'archipel pour diverses raisons 
qui finalement brassaient très large (sexe, ultra-violence et/ou tabous en tout genre). Souvent, ce sont les films très violents auxquels on pense lorsqu'on évoque ce sous-genre du cinéma Hongkongais (qui n'en est pas vraiment un, pour ajouter un peu de flou à la définition !).
RUN AND KILL est l'un des meilleurs représentants des Cat.3, et aussi l'un des plus accessibles. Ce qui ne veut pas dire qu'il soit inoffensif, loin de là...

Le film de Billy Tang montre un homme d'affaires trop gentil (Kent Cheng) et soumis à sa femme qui surprend celle-ci avec son amant. Il n'a la force de rien si ce n'est d'aller noyer son chagrin dans l'alcool au fond d'un bar... rond comme un coing, il divague sur le fait de vouloir tuer son épouse et finit par être mis en relation avec des criminels, qui vont se charger de réellement la tuer !

Le mari soumis découvre sa femme et son amant:
le début de la fin.

Alors qu'il décuve, le massacre a bel et bien lieu et il se retrouve de plus sans avoir de quoi payer les odieux responsables, qui vont mettre le feu à son lieu de travail et le harceler. Sa rencontre avec un groupe de clandos vietnamiens lui proposant de régler tout ça semble être sa porte de sortie. Elle sera en réalité une boîte de Pandore qui libérera les pires atrocités sur son entourage et lui. S'ensuit une escalade de violence allant loin, très loin...

Dans ce RUN AND KILL, il est impressionnant de voir le mélange de tons. Ca joue un peu en cabotinant pour amuser la galerie (Kent Cheng et sa fillette qu'il adore), ça se bat sur fond de bruitages disproportionnés (le meurtre de la femme volage et de son amant), mais le fait que le film aille au bout de son propos sans faire aucune concession, et que la mise en scène de Billy Tang soit très inventive et rythmée, façonne une oeuvre juste imparable. Que certains parviennent à apprécier au 2nd degré... Pourquoi pas. On peut en effet lire ce RUN AND KILL comme une comédie (très noire).

Ne vous attendez pas à un petit film fauché;
Run & Kill est également généreux en matière de spectacle.

En attendant, les scènes d'action sont remarquables et exploitent les décors à merveille, comme souvent dans le cinéma d'action/polar de HK. Le budget est également au RDV, jamais le projet ne parait cheap ou bâclé, et c'est même tout le contraire : des cascades viennent régulièrement pimenter le récit ainsi que la pyrotechnie, notamment pour révéler le trauma du personnage du leader des clandestins, complètement cintré.
Au passage, la présence d'acteurs prestigieux au casting (Cheng donc, mais également l'excellent Simon Yam, ou encore Esther Kwan et Danny Lee comme d'hab dans un rôle de policier), participe à la crédibilité des protagonistes et de l'entreprise dans son entièreté.

Un peu comme si, chez nous, il était tout à fait normal de voir des Benoit Magimel, Gilles Lelouch ou Djamel jouer dans des films interdits aux -17 ans où des gamins sont brûlés vifs durant de longues secondes et des corps mitraillés plus que de raison (alors qu'ils sont déjà inertes depuis longtemps) ! Le tout le plus sérieusement du monde, bien entendu...

Simon Yam campe un personnage des plus extrêmes !

Dans tous les cas, la morale et le message de RUN AND KILL peuvent difficilement passer à côté du spectateur, qui reste coi alors que le générique de fin continue de défiler sur le dernier plan de l'ultime scène.

Ce n'est pas demain la veille qu'on pourra revoir des films de cette teneur... ni que les Catégorie III seront détrônées de leur podium de subversivité.

- Arthur Cauras.



* Certains des plus extrêmes des Catégorie III : 
- THE UNTOLD STORY et DR LAMB, inspirés des méfaits ignobles d'un continental à Hong Kong, qui tuait et mangeait ses victimes,
RED TO KILL, avec cette jeune handicapée mentale se retrouvant dans un centre spécialisé et qui sera la proie d'un violeur en série,
CAMP731, montrant avec beaucoup de complaisance, il faut le dire, les tortures orchestrées par les japonais sur les chinois pendant la Seconde Guerre Mondiale,
EBOLA SYNDROME, un délire putassier éclatant toutes les normes, narrant les dérives d'un porteur sain du virus ébola... cherchant à le propager le plus possible, 
- THE STORY OF RICKY, un autre délire particulièrement réjouissant se déroulant dans une prison, avec une sorte de Ken le Survivant au rabais éclatant littéralement ses adversaires (rixes avec énucléations, mains explosant, étranglement avec viscères,...),
- DAUGHTER OF DARKNESS et ses suites, notamment BROTHER OF DARKNESS, montrant des personnages fragiles brimés explosant à un moment donné et libérant toute la violence contenue depuis des années sur leurs oppresseurs,

Etc, etc.



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